La terre des signes

Les formes géométriques ne sont nulle part visibles dans le monde. Le rond approche peut-être du cercle, il lui est irréductible. Rien ne conduit de l’un à l’autre. Ce n’est qu’une fois la relation établie que quelque chose s’en déduit. Les cercles, carrés, triangles et cônes sont issus d’une manipulation de signes et de leurs instruments d’écriture : mathématiques. À un langage fut donné les formes par où saisir, accueillir et décrire ce qui lui était étranger, formes qu’il pouvait déployer au loin dans le monde, sans plus aucune trace de lui-même, ou dans lesquelles il pouvait se recueillir et y poser ses marques : cieux zodiacaux ou plans sur le sol. Le langage installa, habita, un espace qui demeura inassimilable au reste du monde. Malgré la pérennité et la prétendue universalité du langage mathématique, rien n’indique que son espace géométrique soit le plus profond ou même le premier, il faut compter avec les atlas anatomiques, les cartes de navigation et les peintures rupestres.